C’est la première fois depuis 5 ans qu’elle se produit en France que la Compagnie est contrainte à une telle mesure. La polémique a gonflé en effet depuis que la municipalité a décidé d’ajouter sur l’affiche la mention "Comment vivre à proximité d’un point de deal".
Qui et où cette décision étonnante a été prise demeure un mystère à ce jour. Eric Piolle a refusé de répondre aux journalistes depuis le début de la polémique. Il n’est pas exclu que sa majorité soit divisée aussi sur ce sujet.
Seul Olivier Bertrand, un adjoint au maire a défendu la position de la Ville.
Cette pièce raconte l’histoire d’un jeune couple qui décide d’habiter dans une cité HLM pour y vivre la "mixité sociale" présentée dans une vision multiculturelle très positive de la cohabitation entre les cultures.
Le rajout de la municipalité a suscité l’émotion dans de nombreux secteurs et de la part de divers intervenants : depuis le chroniqueur-écrivain Eric Naulleau jusqu’à Yannick Biancheri le secrétaire départemental d’Alliance police nationale en Isère. Tous s’étonnent de la mansuétude municipale à l’égard des trafics et de sa volonté de les considérer comme acquis, ce que confirme Olivier Bertrand, en expliquant à la population comment s’y adapter.
Les médias nationaux s’en sont emparé et les Grenoblois ont semblé revivre l’épisode malheureux du Burkini, ce fameux "maillot de bain couvrant" qu’Eric Piolle voulait autoriser dans les piscines, avant d’être recadré par le Conseil d’Etat.
Alain Carignon est monté au créneau sur BFM-TV en racontant comment la population s’adapte : "Une personne âgée modeste, habitant Mistral, m'a expliqué qu'elle demandait à ses enfants de venir la voir le moins souvent possible. Quand ils venaient, elle les attend au bas de l'immeuble et les raccompagne à leur voiture. Elle craint tellement pour eux". Pour l'opposant, cette opération de la municipalité "est une nouvelle provocation".
Mais une affaire dans l’affaire est en train de naitre. Celle de la liberté artistique. Une autorité politique, sous prétexte qu’elle finance une représentation, peut-elle s’arroger le droit d’en modifier la présentation publique et d’en orienter le sens ? Sans l’autorisation des créateurs et des ayants-droit ? La Compagnie Artiflette n’a émis aucun commentaire à ce sujet.
On imagine sa sensibilité artistique peu éloignée de la plupart des orientations municipales sur le multiculturalisme. Pourtant la question de principe ne peut pas ne pas se poser. Au plan juridique, comme de la responsabilité politique.
L’extension de la polémique à ce volet tomberait mal pour la municipalité qui a été successivement mise en cause à propos de son interventionnisme culturel à coup de "chartes", d’obligations diverses et de prise en mains des programmations théâtrales par la Ville, précédemment assurées par un collectif indépendant. Les deux adjointes au maire à la Culture, Corinne Bernard, puis Lucille Lheureux ont été mises en difficultés. Cette dernière serait en voie de reconnaitre l’échec des politiques engagées dans les trois Théâtres, politiques qui avaient été présentées comme emblématiques des nouveaux choix municipaux.
L’annulation des "Copains d’en bas" n’est pas seulement un échec symbolique pour avoir voulu imposer une lecture univoque de la réalité des quartiers, ignorant les difficultés et les drames que la présence des délinquants implique. Elle ouvre un autre front sur la question de l’intervention municipale dans la création culturelle. A suivre.